Le smog, fameux brouillard de pollution recouvrant nombres de grandes villes depuis le début de l’ère industrielle, et dont le nom est issu de la contraction de smoke (fumée) et fog (brouillard), pose des problèmes tant en terme de santé publique qu’environnementale. En effet, on estime que la pollution de l’air tue environ sept millions de personnes chaque année dans le monde et quarante-huit milles en France.
Afin de sensibiliser à ce danger, la France organise tous les ans la journée de la qualité de l’air. En 2020 elle a eu lieu le 19 septembre.
Les régions les plus touchées depuis la fin du XIXè siècle
La Grande-Bretagne est la première touchée par le phénomène du smog puisque c’est en son sein que sont développées les machines nécessitant l’utilisation de charbon. Ensuite, tant les pays de l’ancien monde que du nouveau se trouvent grandement touchés par cette nappe étouffant tout un chacun (Zimmer, 2013). Certains se souviennent encore du « grand brouillard de Londres » qui touche la ville en 1952, celui-ci s’engouffrant même dans les bâtiments, contraignant les autorités à annuler tous les événements, et tuant entre quatre milles et douze milles personnes. Ces épisodes mortels de l’histoire ont amené les gouvernements à légiférer : en Grande-Bretagne, deux Clean Air Acts ont vu le jour en 1956 et en 1968, aux Etats-Unis, c’est le Air Quality Act qui a été mis en place en 1967.
Ensuite, à partir des années 1960 et 1970, avec la délocalisation des usines et l’industrialisation du Japon, les smogs se sont déplacés en Asie, notamment dans le sud-est du continent. Aujourd’hui, c’est en Chine, en Inde mais aussi dans certaines grandes villes d’Afrique que se rencontrent les plus gros smogs, bien qu’il y en ai dans la majorité des métropoles du monde. Selon un article publié sur France Culture, Onitsha (Nigéria) serait la ville avec l’air le plus pollué. De plus, il n’est pas rare que la Pologne voit sa qualité de l’air plus mauvaise que celle de la Chine.
En 2002, des chercheurs se rendent comptent que les smogs peuvent être bien plus grands que le périmètre des mégalopoles et de leur région : ils peuvent toucher la moitié d’un continent. C’est le cas de l’Atmospheric Brown Cloud, « immense nuage brun de trois kilomètres d’épaisseur » (Zimmer, 2013 : 29) repéré en Asie du sud-est mais affectant d’autres régions du monde.
Les polluants atmosphériques : qui sont-ils et d'où viennent-ils ?
Parmi les polluants atmosphériques, il y a ceux qui sont visibles (telles les fumées de cheminées) et les invisibles, nommées particules fines (PM10 et PM2.5), très fines (PM1.0) et ultrafines (PM0.1). Quand bien même la majorité des émissions des polluants soient anthropiques, certains sont d’origine naturelle (éruption volcanique, tempête de sable ou certains composés organiques volatiles (COV) rejetés par les plantes ou les sols lors du labour). Les pics se produisent notamment lors d’inversion des températures, l’air chaud produit par la ville se trouve alors plaqué au sol. Si, en plus de ce phénomène, il n’y a pas de vent ou de pluie pour balayer les polluants, un smog se forme.
Jusqu’aux années 1940-50, ceux-ci sont majoritairement composés de suie provenant des usines et du chauffage domestique (parfois alimenté avec un combustible de mauvaise qualité, cela ne permettant pas une bonne combustion, et donc le rejet de plus de suie). De l’association de la vapeur d’eau et du dioxyde de souffre (SO2) contenu dans la fumée nait l’acide sulfurique, composé mortel.
Aujourd’hui, ils n’ont pas tous la même composition, cela dépend de l’endroit duquel ils sont émis. Ils sont principalement constitués d’oxydes d’azote (NOx) d’oxydes de soufre (SOx), de monoxyde de carbone (CO) et de COV, composés trouvant leur origine dans la circulation routière, dans l’industrie et l’agriculture. Les COV sont eux-mêmes un ensemble de d’éléments provenant de la combustion et de l’évaporation des carburants et des solvants. Rentre également en jeu l’ozone troposphérique – c’est-à-dire l’ozone se trouvant dans la couche d’air la plus proche de la surface terrestre – résultant de la réaction chimique entre l’oxygène, les NOx, les températures élevées et le soleil (Huchet, 2016).
Seuils d'alerte, maximums autorisés et records de concentration
L’organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de ne pas dépasser certaines concentrations de polluants dans l’air. Pour les particules fines PM10 il est préconisé de ne pas excéder 20 microgrammes (µg) par mètre cube d’air par an, le maximum étant fixé à 50µg pour 24 heures consécutives. En ce qui concerne les PM2.5, les limites sont fixées respectivement à 10µg et 25µg par mètre cube d’air. De plus, l’OMS considère qu’il est dangereux de respirer un air où il y a plus de 150µg de particules fines par mètre cube d’air.
En ce qui concerne la France, il existe plusieurs seuils d’alertes, en fonction des polluants concernés. Pour l’ozone, le plus fréquent en été, il y a trois niveaux d’alertes : le premier est appelé « seuil d'alerte pour une protection sanitaire pour toute la population » (Airparif) et est lancé lorsque l’ozone dépasse 240µg/m3 pendant une heure. Ensuite viennent les seuils à partir desquels sont déclanchées les mesures d’urgences (circulation alternée, interdiction de circulation pour les véhicules les plus polluants, etc.).
En Europe, l’air est surveillé depuis environ un siècle, avec des mesures quotidiennes des PM10 au début des années 2000 et des PM2.5 à partir du 1er janvier 2021. Aujourd’hui, des restrictions sur les quantités de soufre et de plomb dans les carburants (tant sur terre qu’au large) et des normes auxquels les industriels sont soumis (avec l’obligation d’utilisation de filtres à particules par exemple) permettent de limiter les émissions de polluants. Cependant, il est difficile de dire si la qualité de l’air, notamment dans les villes, s’améliore ou non : d’un côté la quantité de certains polluants diminue, mais les mesures d’ozone et de particules fines montrent une augmentation constante.
Sur les vingt villes avec l’air le plus pollué du monde, seize se trouvent en Chine (chiffres de 2001). Par exemple, en novembre 2015 à Shenyang, la densité de particules fines dans l’air atteignait 1000µg, soit vingt fois le taux maximum à ne pas dépasser pour être en bonne santé. Toutefois, c’est sur le pont des paquebots (tant à quai qu’en mer) qu’est enregistré le plus haut taux de particules fines (Médiapart, 2018).
Les conséquences sur le vivant
En Chine, lors des forts épisodes de smog nommés « airpocalypse », les habitants des villes touchés s’exilent dans les villes ou campagnes moins touchées, de manière temporaire ou définitive. Et ce n’est pas sans raisons, car la pollution de l’air est néfaste tant pour la faune que la flore. Toutefois, il faut savoir que ce ne sont pas tant les pics de pollution qui impactent durablement la santé, mais la pollution de fond.
Les polluants impactent différemment la santé en fonction de leur nature. Les particules fines PM10 vont jusqu'aux poumons mais sans pénétrer les alvéoles pulmonaires, contrairement aux PM2.5. Les particules ultrafines sont surement encore plus pernicieuses pour la santé car elles sont capable, depuis les poumons, de s’introduire dans les vaisseaux sanguins. Parmi ces particules, celles d’ozone et de dioxyde de soufre sont celles perturbant le plus le système respiratoire : elles engendrent « de l’inflammation et du stress oxydatif qui dénature les cellules conduisant à un vieillissement et une mort prématurée des cellules, et augmentant leur risque de mutation maligne. » (France culture, 2015). Ainsi, les particules fines sont désignées comme cancérigène certain par l’OMS.
La flore peut être plus ou moins impactée selon sa composition chimique. Toutefois, l’ozone est le gaz avec le plus d’impact sur les plantes : il nécrose les feuilles de la plante, cela lui empêchant la photosynthèse de s’effectuer, de ce fait la plante ne peut croitre correctement, ceci pouvant se répercuter sur la totalité des écosystèmes (voir schéma ci-contre). De plus, les polluants peuvent modifier en profondeur les plantes, impactant ainsi la coopération inter-espèces (entre végétaux ou avec les insectes et champignons vivant en symbiose avec la ou les plantes concernées) mais également leur système de défense et leurs qualités nutritives. De plus, des réactions peuvent se produire entre les composants de la plante et les gaz atmosphériques, celles-ci étant parfois plus toxiques que le polluant lui-même (Garrec, 2017).
Ces polluants ont également des impacts sur les sols, les cours d’eau et les nappes phréatiques, notamment par le biais des pluies acides et des cendres des centrales à charbon, qui ont la particularité de s’épandre sur de très grandes zones.
Quelques solutions et les actions du SAMU
Ainsi, nous voyons que la pollution atmosphérique en général et le smog en particulier sont une conséquence de nos modes de vie et sont néfastes pour le vivant en général. De ce fait, il parait évident qu’une des solutions s’offrant à nous est de mettre en place, dès que possible, les mobilités douces ou vertes, c’est-à-dire de marcher, de prendre le vélo, les transports en commun ou de faire du covoiturage lorsque nous avons besoin de nous déplacer. Une deuxième solution serait de faire attention à notre consommation d’énergie et de biens manufacturés.
Quoiqu’il en soit, le SAMU de l’environnement travaille actuellement avec des partenaires afin de répondre au mieux aux demandes d’évaluations de la qualité de l’air, tant intérieur qu’extérieur. De plus, nous avons en projet la confection d'une mallette d’intervention sur la qualité de l’air. Celle-ci nous permettra d’avoir plus d’autonomie et d’agir plus rapidement sur les suspicions de pollution de l’air.
Manon Berne
Références
Airparif, Les critères nationaux de qualité de l’air.
Combis Hélène, 2015, « Pollution : un air de plus en plus maussade ? », France Culture.
Huchet Jean-François, 2016, « Airpocalypse », in La crise environnementale en Chine, Paris, Les presses de Science Po : 17‑46, URL : https://www-cairn-info.gorgone.univ-toulouse.fr/feuilleter.php?ID_ARTICLE=SCPO_HUCHE_2016_01_0017.
Moisan Dorothée, 2018, « Paquebots de croisière: un succès noirci par la suie », Mediapart.
Reuters Agence, 2018, « La CJUE condamne la Pologne pour la pollution de l’air », Mediapart.
Zimmer Alexis, 2016, Brouillards toxiques, Zones sensibles.
Zimmer Alexis, 2013, « Brouillards mortels de la vallée de la Meuse », Les cahiers de la fonderie, n° 47 : 30‑37.