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La notion de "service écosystémique"

 

Depuis son existence, l’Homme, pour survivre, s’appuie sur le milieu dans lequel il évolue. La collecte de ressources (alimentaires, de chauffage, de matériels permettant la confection d’outils…) est le lien le plus évident entre l’Homme et son environnement, mais bien d’autres « services » nous sont rendus par celui-ci.

 

Accentuées depuis l’ère industrielle, les pressions humaines sur l’environnement ont amené les sociétés à réfléchir quant aux différents bénéfices tirés par l’Homme de son environnement et à accorder une valeur, monétaire ou non, aux systèmes permettant ces différents bénéfices : les écosystèmes. 

 

Historique de l'utilisation du terme de « service écosystémique »

Dans les années 80, une notion apparaît dans les publications scientifiques : celle des services écosystémiques. Rappelons-le, un écosystème se défini en tant que système formé par un environnement et par l’ensemble des espèces qui y vivent, s’y nourrissent et s’y reproduisent. On entend ainsi la notion comme les différents « services » rendus par les écosystèmes.

 

 

Le contexte d’utilisation du terme est double. D’une part, celle-ci marque une volonté d’intégration des dimensions systémiques et dynamiques des processus écologiques dans les travaux scientifiques. D’autre part, la notion affiche une volonté d’alerter sur le rythme de développement des activités humaines. En effet, certains scientifiques parlent d’une « atteinte des limites des capacités de charge de la planète » comme conséquence possible de ce développement.

 

Ainsi, l’idée d’une évaluation des services rendus par la nature croit. L'idée est vue comme une solution permettant l’évolution des consciences quant à la nécessité du bon fonctionnement des écosystèmes pour un maintien de la vie humaine, et le terme de service écosystémique se rencontre de manière croissante dans les publications. Un des articles ayant le plus de poids est celui de Costanza et al. , publié dans la revue Nature en 1997,  dans lequel une évaluation monétaire des services écosystémiques et du capital naturel à l’échelle mondiale est proposée.

 

C’est toutefois le Millennium Ecosystem Assessment (ou Évaluation des écosystèmes pour le millénaire) qui permettra l’institutionnalisation du concept de service écosystémique, et sa prise en compte dans les décisions politiques internationales. Forum international conduit entre 2001 et 2005 et faisant intervenir plus de 1300 experts sur le thématique de la biodiversité, le MEA a été conduit dans le but d’examiner comment les changements qui touchent les services écosystémiques influencent le bien-être de l’homme.

 

 

Une définition de la notion de services écosystémiques acceptée par l’ensemble des scientifiques fut adoptée sous cette forme : « ensemble des biens et services que les hommes peuvent tirer des écosystèmes, directement ou indirectement pour assurer leur bien-être ».

 

Approfondissement de la notion

Les services écosystémiques furent classés en quatre grandes catégories :

  • Les services de support ou de soutien :

Ceux-ci permettent la création des conditions de base au développement de la vie, et sont nécessaires à la production des autres services. Ils comptent notamment la formation des sols, le cycle des nutriments et la production primaire.

  • Les services d’approvisionnement ou de production :

Ces services correspondent à l’ensemble des produits obtenus à partir de l’écosystème, tels que la nourriture, l’eau, les fibres ou encore les produits pharmaceutiques.

  • Les services de régulation :

Cette catégorie englobe les services permettant une régulation des phénomènes naturels. On peut citer la régulation du climat, des maladies, des parasites, la purification de l’eau…

  • Les services culturels :

Enfin, ces derniers services sont tous les bénéfices non-matériels permettant à l’humanité de s’enrichir spirituellement ou d’accroitre son développement cognitif. Cela comprend les valeurs spirituelles et religieuses, l’esthétique du paysage et les différents loisirs pratiqués en milieu naturel.

 

 

Il peut être intéressant, pour éviter certaines confusions,

de distinguer le terme de fonction écologique.

L'écosystème, via ses différentes composantes (flore, faune, environnement physique) et leurs interactions, assure la réalisation de fonctions écologiques. Ce sont les différents processus biologiques assurant le fonctionnement et le maintien de l’écosystème, et sont ainsi à l'origine des services écosystémiques.

 

Pour illustrer, la fonction écologique « écoulement de l’eau » participe au services de « régulation du climat », « régulation des cycles hydrologiques » et « régulation des maladies ». Une fonction peut ainsi participer à la réalisation de plusieurs services, et de même un service peut être assuré par différentes fonctions.

Rien de tel qu'un exemple concret pour une meilleure visualisation de la notion. Le schéma suivant regroupe un ensemble de fonctions écologiques réalisées au sein d'un écosystème forestier, associé aux divers services écosystémiques dont profite finalement l'Homme.

 

Conclusion

 

Avant l'apparition de la notion de service écosystémique, les rapports en charge d'évaluer l'état de la biodiversité à l'échelle mondiale insistaient sur la dégradation de celle-ci et l'implication de l'humanité dans cette dégradation. Le terme de service écosystémique a ainsi été employé afin d'insister sur les conséquences de cette dégradation sur le bien être humain.

Des critiques ont été émise d'une part sur l'aspect anthropocentré du terme, faisant entendre que ces services seraient "dus" à l'humanité, et d'autre part sur la vision simpliste de la notion par rapport à la complexité des écosystèmes.

 

Pourtant, la notion de service écosystémique ne cesse d'être utilisée de manière croissante à l'échelle internationale, et est notamment de plus en plus prise en compte dans les décisions politiques. Un des outils économiques les plus utilisés à propos de la conservation des services rendus par la nature est le système de paiements pour services environnementaux, mais celui-ci fera l'objet d'un prochain article.

 

 

Bibliographie

Blanchart E. « Les services écosystémiques ».
Disponible sur : < https://www.supagro.fr/ress-pepites/Opale/ServicesEco/co/ServicesEcosystemique.html >

 

Costanza R., Hannon B., Limburg K., Naeem S., O’Neill R. V., Raskin R. G., Sutton P. « The Value of the World’s Ecosystem     
Services and Natural Capital ». Nature, 1997. Vol. N°387, n°6630, p 253-260.

 

Coulomb P. « Les services rendus par les écosystèmes forestiers : une évaluation dans le cadre du programme EFESE ». In :  
Fondation pour la recherche sur la biodiversité, 2019.
Disponible sur : < https://www.fondationbiodiversite.fr/les-services-rendus-par-les-ecosystemes-forestiers-une-evaluation-dans-le-cadre-du-programme-efese/ >

 

Doussan I. « Brève histoire de l’intégration de la notion de service écosystémique en droit: » Droit et Ville, 1 juillet 2017. Vol. N°84, n°2, p. 81‑94.

Disponible sur : < https://doi.org/10.3917/dv.084.0081 >

 

Dufrêne, M. « Les services écosystémiques forestiers ». In Foire de Libramont: Regards croisés sur les services écosystémiques 
des forêts: quels bénéfices socio-économiques et écologiques pour notre société,
2015.

 

Méral P., Pesche D. « Les services écosystémiques », éditions Quae, 2016.
Disponible sur : < https://doi.org/10.35690/978-2-7592-2470-8 > ISBN : 978-2-7592-2470-8.

 

« L'écosystème et les services écosystémiques forestiers » . In Forêt Pro Bos

 Disponible sur : < https://www.foret-pro-bos.eu/fr/organisation-et-elus/organisation-et-elus-2 >